Cameroun : Immersion dans la SOCAM 5C, qui livre son expérience sur le cacao durable

Basée à Obala à une quarantaine de kilomètre de Yaoundé, cette coopérative s’est lancée dans la production du cacao certifié en 2018.

« La SOCAM 5C,  c’est la Camerounaise de Culture de Certification et de Commercialisation du Cacao et du Café (SOCAM 5C). Elle est certifiée Rainforest Alliance et compte 1200 cacaoculteurs  actifs dans les  départements de la Lékié et de la Haute-Sanaga. Elle produit annuellement environ 2000 tonnes de cacao qu’elle vend prioritairement à des chocolatiers européens » présente d’entrée Kakambi Patrick l’Administrateur Directeur-général de cette structure. Pour réussir son pari de produire un cacao de qualité, la SOCAM 5C a mis en place une équipe qui travaille en fonction des principales exigences de la norme Rainforest Alliance qui sont : la gestion, l’environnement, la traçabilité, l’agriculture, le social, le revenu et la  responsabilité partagée.

Ndongo Jean le responsable environnemental souligne : « Nous interdisons les feux de brousse et utilisons  très peu de pesticides dans les cacaoyères.  Le comportement de nos producteurs a changé : Avant, il ne tenait pas compte du temps de rémanence des produits phytosanitaires qu’ils utilisaient. Ce n’est plus le cas aujourd’hui » rassure-t-il. La gestion des emballages plastiques vides des produits phytosanitaires s’est aussi améliorée.  Les producteurs les réutilisaient après les traitements soit pour puiser de l’eau ou pour y garder leur vin de palme. Aujourd’hui ils les jettent dans une grande caisse installée dans chaque village,  afin qu’une société partenaire vienne les récupérer afin de les recycler ou les détruire complètement. « Il n’y a plus de coupe d’arbres dans les cacaoyères, nous en plantons plutôt. Notamment les safoutiers, les avocatiers, les orangers et le Djansang.» a-t-il indiqué à La Voix du Paysan.

Une brigade phytosanitaire  dans chaque village

Concernant les bonnes pratiques, le désherbage est exclusivement manuel avec la machette. « La formation aux bonnes pratiques a 3 volets : le volet agro écosystème c’est-à-dire le milieu de vie du cacaoyer où il a des amis et des ennemis, le volet intervention phytosanitaire et le volet récolte. Une brigade phytosanitaire existe dans chaque village. Elle n’utilise  comme produits de traitement contre les maladies et les ravageurs,  que les insecticides et les fongicides homologués par Rainforest Alliance et le Ministère de l’agriculture et du développement rural (Minader). De Décembre à Avril, il faut que le cacao soit bien défriché, taillé, et que l’ombrage soit bien réglé. D’Avril à Juillet, il faut des bio stimulants pour donner la force au cacao. De Juillet à Octobre on peut encore utiliser les insecticides. A partir d’Octobre, c’est les fongicides qui sont de mise. » Précise Essono Ndongo Richard, qui s’occupe du volet agricole.

Pour la traçabilité du cacao, des mécanismes ont été mis en place afin de toujours connaître la provenance exacte des fèves qui arrivent à la SOCAM 5C. Il y a aussi la cartographie des producteurs qui est faite afin de s’assurer de l’installation de ses membres dans les zones de culture appropriées et non dans les aires protégées ou des zones à risque.  « La traçabilité commence aussi par l’estimation des rendements avant la récolte du cacao dans les champs, afin ne pas courir le risque de recevoir un cacao qui vient d’ailleurs » Souligne Nké Ayissi Denis qui est en charge de ce domaine très délicat.

Les bonnes pratiques agricoles ont augmenté les rendements

Le volet social s’appesantit sur le travail des enfants et sur l’autonomie des femmes. Les activités menées dans les cacaoyères par les enfants dépendent de leur âge. Avant l’âge de 18 ans, l’enfant ne doit ni défricher, ni pulvériser ou écabosser le cacao. Koudi Pierre Roger le responsable à charge du social explique : « Les enfants ne doivent pas porter de lourdes charges. Ils doivent aussi être à l’école aux heures de classe et non dans la cacaoyère. Pour respecter cette exigence,  nous avons sur le terrain des agents de liaison qui y veillent et nous envoient des rapports tous les 3 mois. La SOCAM 5C marque cette volonté d’envoyer les enfants à l’école en octroyant des crédits scolaires à ses membres pendant les rentrées ». Cette coopérative met un point d’honneur à ce que les femmes suivent les formations dispensées en même temps que leurs époux. Des associations villageoises d’épargne et de crédit (AVECS) composées à grande majorité des femmes sont été mises sur pied afin de les aider à lancer des activités génératrices de revenus.

Le cacao durable implique toutes les parties prenantes, du producteur  au chocolatier basé en Europe en passant par la coopérative. C’est cela la responsabilité partagée. Kakambi Patrick explique : « Avant de signer un contrat, il est question pour la coopérative de s’entendre avec le chocolatier sur le montant de la prime à verser au producteur, à la coopérative et aux activités communautaires en direction des producteurs. Tout cela est bien établi dans le contrat. La coopérative à son tour met en place le système et encadre les producteurs. Tout cela rentre dans la responsabilité partagée » précise-t-il.

Au final, c’est la qualité et la quantité du cacao produite par la SOCAM 5C qui inspirent le respect, et les membres de cette coopérative qui s’en tirent plutôt pas mal. « Le feed-back que nous avons du terrain, c’est qu’ils gagnent en vendant leur cacao avec une balance juste et ne se font plus arnaquer. Beaucoup de producteurs ont augmenté leurs rendements grâce aux bonnes pratiques qui leur ont été enseignées. Ils dépensent  moins en termes d’achat des produits phytosanitaires et reçoivent  la prime comme bonus en fin de campagne ». Raconte Kakambi Patrick.

Irénée Modeste BIDIMA

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