Un juge de l’exécution de Nanterre a condamné il y a une semaine, la Société financière du caoutchouc (Socfin) appartenant à l’industriel français Bolloré, à payer 140 000 euros à des paysans camerounais pour ne pas avoir transmis des documents qui pourraient établir les liens du groupe avec l’entreprise Bolloré, selon un jugement consulté par l’AFP.
Les 145 riverains dénoncent l’exploitation de palmiers par la Socapalm (Société camerounaise de palmeraies) près de leur lieu de vie. Selon eux, elle condamne leur accès à des terrains et lieux de sépulture, et pollue les eaux dont ils dépendent.
Or ils assurent que la Socapalm est contrôlée par le groupe Bolloré via la holding belgo-luxembourgeoise Socfin, ce qui soumettrait le géant industriel français au « devoir de vigilance » sur ses activités.
Une loi de 2017 oblige les plus grandes entreprises à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et l’environnement chez leurs sous-traitants et fournisseurs étrangers.
La décision du juge d’exécution est « la première victoire concrète qui se base sur la loi de responsabilité sociale des entreprises, même si c’est par ricochet, par une liquidation d’astreinte », se félicite leur avocat, Me Fiodor Rilov.
En décembre, la cour d’appel de Versailles (ouest de Paris) a reconnu que les activités de la Socapalm sont « susceptibles de porter atteinte aux droits fondamentaux » des demandeurs « et notamment à leur droit à un environnement sain ».
La cour avait donc demandé la production des procès-verbaux des assemblées générales de Socfin et Socapalm des quatre derniers exercices pour « déterminer le rôle exact joué par la société Bolloré SE en leur sein ».
Socfin a bien partagé certains documents mais en « a délibérément écarté certaines pièces », note le juge de l’exécution, qui a également accepté la demande de l’avocat des Camerounais d’augmenter le montant de l’astreinte, à 10 000 euros par jour de retard de remise des documents.