L’élevage des poissons a certes enregistré des avancées ces dernières années au Cameroun avec une production actuelle chiffrée à 15 000 tonnes, mais le bilan reste mitigé eu égard aux énormes potentialités. Une récente étude propose des pistes de solutions.
Le Cameroun importe chaque année plus de 250 000 tonnes de produits halieutiques, qui engloutissent près de 160 milliards de francs CFA selon Divine Ngola Tombouh le sous-directeur chargé de l’aquaculture au Minepia. Pour inverser cette tendance, Dr Taîga le ministre de l’élevage, des pêches et des industries animales a invité en juillet dernier des investisseurs à exploiter le potentiel aquacole qu’offrent les fleuves Dibamba, Nyong, Sanaga et les retenues d’eau de Lagdo, Lom Pangar et les façades maritimes entre Kribi et Campo, puis entre Limbe et Idenau.
Une étude menée par 3 chercheurs et publiée en 2019, fait un état de lieux de la pisciculture camerounaise et met en relief les défis majeurs à relever. Pour Junie Albine Atangana Kenfack, Christian Ducarme et Jean-Claude Micha les 3 co-auteurs de ‘’La pisciculture au Cameroun: bilan et perspectives’’ : « il faudrait sortir de l’amateurisme financier et recourir à une expertise certifiée, à du personnel compétent, motivé et bien payé » en vue d’un décollage effectif de l’aquaculture déclarent-ils. Des contraintes institutionnelles, techniques, de gestion des étangs et économiques sont les principales embûches qui ont été relevés dans cette étude qui a été réalisée dans les régions de l’Ouest, de l’Est et du Centre.
Garantir l’accès au foncier et aux financements
Sur le plan institutionnel, il y a la méconnaissance des lois et règles relatives à l’aquaculture, l’accès difficile au foncier particulier les bas-fonds, les équipements obsolètes des stations aquacoles, l’accès difficile aux alevins et à l’aliment de bonne qualité entre autres. Sur le plan technique, les études de faisabilité et l’aménagement des étangs sont généralement approximatifs à cause des budgets bâclés faute des financements insuffisants. La gestion des étangs fait face à des inondations, des ruptures de digues et la prolifération des plantes aquatiques. Sur le plan économique, on relève l’absence des crédits à un taux acceptable, les faibles compétences managériales des promoteurs piscicoles, La mauvaise organisation du marché des intrants et des produits de la pisciculture.
Les pistes de solution proposés par cette étude sont nombreuses, notamment :
- La professionnalisation des acteurs de la filière aquacole, partant des producteurs d’alevins et d’aliment pour poisson, des fournisseurs de services, des producteurs au consommateur.
- L’élaboration d’un cadre légal spécifique à l’aquaculture permettrait donc de garantir la sécurité foncière des pisciculteurs.
- L’Etat devrait sensibiliser les institutions bancaires sur la rentabilité de la pisciculture, en s’appuyant notamment sur des business plans élaborés, le suivi des fermes pilotes, et la mise en place d’un système fiable de statistiques et d’informations sur l’activité.
- ll est nécessaire de penser à une organisation territoriale de cette activité pour corriger son développement anarchique.
D’après les statistiques du Minepia, l’aquaculture camerounaise est capable de produire 120 000 tonnes de produits halieutiques par an. Aidés en cela par une forte demande nationale en produits de pêche qui avoisine les 11 kg/habitant/an, un réseau hydrographique dense et d’innombrables sites propices à l’aquaculture.
Irénée Modeste Bidima